« Tout ce que je sais, c'est que je ne sais rien. » disait le sage Socrate. De nos jours, cette sagesse élémentaire est mise à mal par l'obligation de se vendre. Sur le marché du travail, par exemple, on attend des demandeurs d'emploi qu'ils se vendent dans leur CV et leurs lettres de motivation. De sorte que la sagesse ne consiste plus à reconnaître son ignorance devant tout ce qu'il reste à savoir, mais bien à mettre en exergue ce que l'on sait déjà. On pourrait penser que c'est sagesse ultime de dire tout simplement ce que l'on sait, plutôt que de jouer cette sorte de fausse modestie qui caractérise les gens dont l'humilité ne sert qu'à les placer plus haut sur un piédestal. L'embêtant est tout de même qu'à force de demander aux gens de savoir se vendre, on finit par créer, à certains égards, une société de m'as-tu-vu, une société où le savoir passe pour un instrument de domination des autres. Il n'est besoin que de voir le sort réservé quelquefois à ceux qui ne savent pas. C'est la raison pour laquelle de nombreux élèves n'osent pas prendre la parole en classe. Par peur de ne pas savoir. Car on leur a distillé à petite dose depuis leur plus tendre enfance l'idée que l'ignorance est le déshonneur suprême et non la condition préalable d'un apprentissage efficace.

 

Denis Dambré 

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